LIVRES

Voyage en Italie

Veiller sur elle (2023)

Un roman de Jean-Baptiste Andrea

Publié chez L’Iconoclaste

580 p.

Je ne peux pas commencer cet article sans vous faire une confidence : je n’ai jamais lu Jean-Baptiste Andrea. Je sais, c’est honteux ! Ce n’est pas l’envie qui m’a manquée. Je vois passer ses romans depuis plusieurs années dans les librairies ; je lis les quatrième de couverture avec envie : mais rien ! Jamais l’occasion, jamais le temps. Toujours autre chose à lire en priorité. Il fait partie de ces fameux rendez-vous manqués. Cent millions d’années et un jour, Des Diables et des saints, Ma Reine…Tant de titres dont j’avais raté le coche. Et puis, on m’a mis Veiller sur elle entre les mains. Il fait déjà partie des succès de cette rentrée littéraire, auréolé du Prix Fnac 2023. Il était temps de s’y mettre.

Nous sommes en 1986. Un homme vit ses derniers instants dans une abbaye italienne où est caché un objet que le Vatican ne veut pas voir réapparaitre. L’homme raconte sa vie de jeune homme qui, rêvant d’être sculpteur, va vivre un parcours initiatique dans une Italie en plein chamboulement politique.

Comme son résumé le laisse penser, Jean-Baptiste Andrea nous convie à prendre part à une grande fresque historique et romanesque. Par ce récit initiatique enrobé de mystère, Le romancier aborde plusieurs thèmes qui s’imbriquent les uns dans les autres : l’ambition et ce qu’on est prêt à sacrifier pour parvenir à ses fins. Parvenir à concrétiser ses rêves justifie-t-il de renier ses principes ? Il y est aussi question, comme dans certains films de Visconti, de la fin d’un monde : l’aristocratie italienne. Le tout est porté par des personnages attachants auxquels l’auteur attribue des personnalités complexes. Mimo, son protagoniste nain rêvant d’être sculpteur, doit opérer des choix moraux tout au long de l’intrigue, nous invitant à nous questionner sur ce que nous aurions fait.

 Car l’autre grande force du livre est de nous raconter la montée en puissance du fascisme italien du point de vue de ceux qui n’en voient pas les dangers. Par petites touches, Andrea nous amène à comprendre comment un pays se laisse dominer par ces idées nauséabondes malgré lui, lentement mais surement. Le propos est bien là sans jamais être professoral.

L’auteur sait comment offrir un divertissement de qualité. Par la construction, tout d’abord. Il utilise les artifices des romans feuilletons, offrant un rebondissement à chaque fin de chapitre qui invite à embrayer immédiatement sur le suivant. Cela devient rapidement addictif. Mais ce procédé ne serait rien sans une écriture qui puisse donner une fluidité à l’ensemble. Le romancier déploie une écriture sensuelle et évocatrice. Il n’a pas à s’encombrer de longues descriptions, le choix précis des mots effectue le travail. On entre immédiatement dedans pour n’en ressortir qu’une fois l’histoire terminée.

Veiller sur elle fait partie de ces grandes fresques historico-romanesques dont il serait dommage de se priver. Si les contextes artistiques et historiques peuvent effrayer au premier abord, Jean-Baptiste Andrea donne toutes les clés pour profiter pleinement de son histoire. Par ailleurs, Il s’agit d’un roman complet où chacun trouvera de quoi le satisfaire : mystère, ambition, vengeance, amour, art, etc. Un délice pour prolonger un peu plus la période estivale !