CINEMA, DANS TON SALON, EN SALLE

« La Chute » poursuit son ascension

Anatomie d’une chute (2023)

Un film de Justine Triet

Avec Sandra Hüller, Samuel Theis,

Swann Arlaud, Antoine Reinartz…

Genre : Policier, drame

Distribué par le Pacte et Mk2 Films

Sortie le 21 Mai 2023

Disponible en dvd, blu ray et VOD

Cette nuit se tenait à Los Angeles la 81ème cérémonie des Golden Globes. Sans surprise, après avoir obtenu la Palme d’Or au festival de Cannes, Anatomie d’une chute de Justine Triet repart avec les trophées du « meilleur Scénario » et du « meilleur film étranger ». Pourtant désavoué par Elisabeth Borne parce que la réalisatrice ne l’a pas brossé dans le sens du poil, le film continue de séduire à l’international. Hélas, pour la raison suscitée, il ne pourra pas briguer l’oscar du meilleur film étranger. A toute fin utile, rappelons que si l’art est politique, la politique ne devrait pas se mêler de l’art. Ceci mis à part, quelles sont les qualités de ce long métrage qui justifient un tel succès ?

Le film raconte le procès de Sandra (Sandra Hüller) après que son mari, Samuel (Samuel Theis), soit tombé du haut du balcon de leur chalet. Epaulée par Maitre Vincent Renzi (Swan Arlaud), elle va devoir faire face à l’avocat général (Antoine Reinartz) et convaincre la Cour de son innocence.

Justine Triet nous a habitué à pervertir les genres cinématographiques. Dans Victoria (2016), elle détournait déjà la comédie romantique pour proposer une analyse très fine de la femme entre deux âges. Ici, c’est le film de procès qui est abordé avec intelligence. A l’instar de La Nuit du 12 de Dominik Moll, ce n’est pas la vérité des faits qui importe ici mais la vérité judiciaire. Savoir ce qu’il s’est produit n’est pas le propos. « La Chute » du titre dont nous sommes invités à découvrir « L’anatomie » n’est pas celle de Samuel.

Cet événement est le prétexte à passer au crible la chute d’un couple, son délitement progressif. vOn y entraperçoit des accès de violence. Peut-être qu’il s’agit de la raison de la mort de Samuel, mais peut-être pas. Le spectateur est invité à se faire son idée.

Pour appuyer sa volonté de ne pas offrir un récit artificiel dont la structure mènerait à une résolution artificielle, Justine Triet ressort des outils dont elle a déjà prouvé sa maîtrise. Ainsi, sa réalisation se veut documentaire. L’image est brute et la caméra bouge régulièrement pendant les séquences de tribunal. Souvent, elle ne trouve pas du premier coup la personne qu’elle doit filmer. Cela ne fait que renforcer le réalisme de son histoire.

Devant cet objet filmique qui modifie nos habitudes de spectateurs, il n’est pas compliqué de comprendre ce qui peut séduire à l’international : des personnages dont il est difficile de discerner la responsabilité, une réalisation documentaire qui brouille les pistes entre le réel et la fiction (renforcé par le fait de faire porter le prénom des comédiens aux personnages). Entre son succès critique et publique, il ne fait aucuns doutes qu’Anatomie d’une chute aurait été un candidat sérieux aux Oscars.

Un article de Florian Vallaud

 

CINEMA, EN SALLE

Le Dupontel nouveau est arrivé !

Second Tour (2023)

Un film de et avec Albert Dupontel

Avec Cécile de France, Nicolas Marié

Sortie le 25/10/2023

Distribué par Pathé

ENFIN, le moment est arrivé ! Cela fait maintenant trois mois que nous l’attendons. Trois mois que nous trépignons d’impatience pour évoquer cette sortie incontournable de l’automne. Trois ans après son dernier film, Adieu les cons (2020), le Dupontel nouveau est arrivé ! Et c’est un très bon cru. Peut-être un peu trop délicat pour certains palais, mais qui se déguste avec plaisir.

Entre-deux tours de l’élection présidentielle. Pierre-Henry Mercier (Albert Dupontel) est le candidat favori, portant des valeurs traditionnalistes et volontiers réactionnaires. Mais ce discours interpelle la journaliste politique Mademoiselle Pove (Cécile de France), placardisée depuis peu au service football. Assistée de son cameraman, Gus (Nicolas Marié), elle décide de mener l’enquête pour comprendre qui se cache derrière ce candidat « idéal ». Mais son enquête ne fait pas plaisir à tout le monde.

Si Albert Dupontel se défend de faire un film engagé, lui préférant le terme de « fable », il est incontestable que ce long métrage aborde des questions essentielles de notre société.  Sur un fond d’urgence écologique, il compose un récit où les personnages sont confrontés à la difficulté d’être en adéquation avec leurs idées. Ils peuvent avoir les meilleures intentions du monde, le système va toujours trouver un moyen de les faire entrer dans le moule afin de se préserver.

Ce propos est cohérent avec l’évolution du cinéma d’Albert Dupontel. Au fur et à mesure que le monde devenait plus cruel, l’auteur est devenu doux-amer. La satire a laissé place à la fable. Les marginaux déglingués, ceux qui tuaient dans une joyeuse anarchie sont devenus rêveurs, utopistes. Ce sont des anomalies dans un monde où le feu de l’espoir s’éteint. Ils en portent les dernières braises. Ce n’est donc pas politique, mais un petit peu quand même.

La mise en scène adopte les oripeaux des thrillers politico-paranoïaques des années 1970. On pense aux Hommes du président (Alan J. Pakula, 1976) ou à I comme Icare (Henri Verneuil, 1979). Chaque plan est travaillé pour être beau, sublimé par une photographie toute en contraste. Les ombres des stores viennent se poser sur le visage des journalistes qui enquêtent, le monde politique est dans une pénombre constante. En totale cohérence avec un gros rebondissement, le réalisateur opère un changement de couleur et de mouvements de caméra à un moment clé du film. Car, qui dit enquête, dit révélations. Et Albert Dupontel n’en est pas avare, baladant le spectateur au gré des fausses pistes et de découvertes improbables, Le tout saupoudré de comédie pour rendre l’ensemble plus aérien.

Albert Dupontel incarne le rôle de Pierre-Henry Mercier avec le talent qu’on lui connait pour camper des hommes secrets et torturés. Mais il laisse la place de protagoniste principale à Cécile de France qui nous offre une journaliste aussi pugnace qu’Elise Lucet. Si son phrasé peut dérouter aux premiers abords, paraître faux, c’est qu’il est conçu comme une partition musicale. Ainsi, son jeu décalé permet de sortir le spectateur du réel, d’entrer dans la fable du réalisateur. Une fois cette barrière passée, elle attire le regard et rappelle qu’elle est une comédienne talentueuse.

Mais celui qui emporte tout sur son passage est un habitué des films de Dupontel. Depuis son premier film, l’acteur est là. Lors de l’avant-première lilloise, le réalisateur affirmait même qu’il était temps qu’on le reconnaisse en tant qu’immense comédien. Nicolas Marié transcende son rôle de cameraman fan de football. A chaque plan, chaque réplique, il offre un nouvel effet hilarant. Il porte en grande partie l’aspect comédie, et cela paraît tellement léger sur ses épaules. A chaque nouvelle histoire, Albert Dupontel semble à la fois lui écrire quelque chose à sa mesure et le pousser dans ses retranchements. Comme s’il voulait prouver par l’expérience que son ami à l’étoffe d’un premier rôle. Et on ne peut qu’être d’accord avec lui.

Second tour est une nouvelle réussite au palmarès d’Albert Dupontel. Un peu moins nihiliste qu’Adieu les cons, il n’en est pas moins profond. Hilarant, palpitant et sublime, il est tout ce qu’on aime chez ce réalisateur. Quant au choix entre le « film engagé » ou la « fable », rappelons que les contes et les fables ont tous une morale. Qu’est-ce qu’une morale sinon une vision claire de ce qui doit être ou ne pas être ? Qu’est-ce qu’une morale sinon un engagement politique ?

Un article de Florian Vallaud

CINEMA, EN SALLE

Un film pratiquement parfait en tout point

Le Retour de Mary Poppins (2018)Résultat de recherche d'images pour "le retour de mary poppins"

Mary Poppins returns

Un film de Rob Marshall

Avec Emily Blunt, Lin-Manuel Miranda, etc

Sortie le 19 Décembre 2018

Distribué par Walt Disney France

Dans le Londres de la Grande Dépression, Jane et Michael Banks ont bien grandis depuis leur rencontre avec Mary Poppins. Jane a pris le relais de sa mère et lutte pour les droits des ouvriers. Michael, quant à lui, vit toujours au 17 Allée des Cerisiers avec ses trois enfants dont la mère est décédée. Il est devenu artiste peintre mais travaille en parallèle dans la banque de son père pour entretenir son foyer. Mais l’argent vient quand même à manquer. Michael a contracté un gros prêt qu’il doit rembourser d’ici la fin de la semaine au risque de perdre sa maison. C’est alors que Mary Poppins décide de pointer le bout de son parapluie.

Il est beaucoup reproché à Disney, ces dernières années, de ne plus offrir des films live originaux. De fait, le studio a lancé une grande campagne de réinterprétation de ses grands succès animés en films « de chair et d’os » pour des résultats très variable. Et ce n’est pas près de s’arrêter. On voit Aladdin, Dumb oet Le Roi Lion approcher dangereusement de nos côtes tandis que Lilo et Stitch apparaît à l’horizon. Quand ils prennent le risque d’offrir une histoire originale, le long métrage ne trouve pas son public : A la poursuite de demain, Un Raccourci dans le temps ou le récent Casse-Noisette et les quatre royaumes.

Mais comment faire lorsqu’on veut reprendre un immense succès du studio qui est déjà un film live ? On ne va pas en faire un film d’animation. Le problème est d’autant plus épineux quand il date de 1964 et que les créateurs d’origine sont quasi tous morts. Il reste la possibilité de faire un reboot. C’est une solution de facilité pour actualiser les films et conquérir un nouveau public. Sinon, on peut faire un sequel qui, bien souvent, est juste une occasion de bourrer le film de clins d’œil. Dans les deux cas, c’est s’exposer à la vindicte des fans du premier film. Ce qu’on pourrait maintenant appeler « un effet Star Wars episode VII ». C’est peu dire qu’on attendait Le Retour de Mary Poppins avec une mitrailleuse.

On ne va pas faire durer le suspense plus longtemps : le film est une réussite malgré des facilités scénaristiques évidentes. Le scénariste, David Magee, reprend la structure du film original de façon quasi identique. L’enchaînement des événements est le même : on retrouve une séquence animée au même endroit, une autre avec les allumeurs de réverbère qui fait écho à celle des ramoneurs, etc. On en vient parfois à penser que certaines pages de scénario ont été réutilisées. Pourtant, l’ensemble est frais et regorge de variations intéressantes. C’est finalement une méthode efficace pour satisfaire le public amateur du film de Robert Stevenson.

Magee a modernisé l’écriture en ajoutant des éléments qui n’étaient pas présent dans le film original : un antagoniste fort et les enfants de Michael qui sont les vrais moteurs de l’intrigue. Mary Poppins est également beaucoup plus active. Elle intervient physiquement pour régler les problèmes alors qu’elle ne faisait que les influencer dans le premier. Ce n’est pas un problème, ni une trahison. C’est une évolution naturelle des choses.

L’autre aspect qui était en droit de nous inquiéter aurait pu faire plonger le film dans l’oubli immédiat : Disney a confié la réalisation au tâcheron Rob Marshall. Pour le studio, il avait déjà assassiné Pirates des Caraïbes IV : La Fontaine de jouvenceet Into the woods. Il nous avait aussi infligé Nine. On en venait à se demander si Chicagon’était pas un fruit du hasard. Dans Le Retour de Mary Poppins, le studio semble l’avoir muselé et cela rend l’ensemble agréable à regarder. La mise en scène n’a rien d’originale ou marquante mais elle est fonctionnelle. La beauté des décors et l’énergie des numéros musicaux prennent le relais et font du film un bonheur de chaque instant. On aurait cependant aimé que la caméra accompagne la folie de ce qu’elle filme. Mais ce n’est que pinaillage.

La partition de Marc Shaiman (compositeur, entre autres, de Hairspray) est enthousiasmante et reste en tête facilement. Il a le bon goût de s’inscrire dans le même registre musical que la musique des Frères Sherman en 1964. C’est gai, pétillant et donne envie d’applaudir à la fin de certains numéros.

Le dernier défi était le casting. Emily Blunt reprend le rôle avec finesse et respect pour le travail de Julie Andrews. Elle y apporte une raideur et une malice rafraîchissante. Elle arrive à convaincre dès sa première apparition à l’écran. Elle trouve dans Lin-Manuel Miranda un sidekickmasculin parfait. Son chant et son jeu sont pleins de reliefs. On espère le revoir bien vite sur les écrans.

Le Retour de Mary Poppins est le film idéal pour les fêtes de fin d’année. Il ne trahit jamais son matériau d’origine et lui offre une suite de grande qualité. Il s’offre le luxe de fourmiller de clins d’œil et de caméos réjouissants et émouvants. En revanche, ne vous attendez pas à trouver Julie Andrews. Elle a refusé l’invitation pour éviter qu’on se focalise sur son cameo plutôt que sur Emily Blunt dont la tâche était déjà compliquée.

Un article de Florian Vallaud

CINEMA, EN SALLE

Un film noir haut en couleurs

Carnage chez les Puppets.Résultat de recherche d'images pour "carnage chez les puppets"

Comédie – USA

Réalisé par Brian Henson

Avec Melissa McCarthy, Elizabeth Banks,

Maya Rudolph…

Sortie en salles le 19 Septembre 2018

Distribué par Metropolitan Films Export

À Los Angeles, nombre de communautés cohabitent en plus ou moins bonne entente, mais aucune de ces communautés n’est moins respectée que celle des Puppets, des marionnettes douées de vie qui vivent au ban de la société. Dans ce melting-pot, Phil Philips fait figure d’exception. Seul puppet à être un jour entré dans la police, il traîne un lourd passé. Reconverti en détective privé, il se retrouve à reprendre du service quand un mystérieux assassin semble déterminé à éliminer les membres du Happytime Gang, une ancienne émission de télé remise au goût du jour.

Bien étrange cas que celui de Carnage chez les Puppets. À l’heure des effets spéciaux tapageurs, un film mettant en scène des marionnettes animées à l’ancienne paraît anachronique. Pire encore, sa bande-annonce accumulant les séquences trashs à l’humour lourdingue pouvait rebuter au premier abord, sans doute au point d’hypothéquer au moins en partie son potentiel. L’objet (à ce moment, on ne s’attendait pas vraiment à un « film » digne de ce nom) semblait lorgner vers un émule de Sausage Party ou des derniers opus de la saga Scary Movie, à savoir un produit sans queue ni tête, dont le scénario, bordélique et mal foutu, ne serait que prétexte à une accumulation de gags aussi trashs que nuls. Autant dire que c’est plutôt par curiosité (et avec un peu de mauvais esprit, avouons-le…) que l’on passe la porte de la salle de cinéma.

Dès les premières images, avec sa vue aérienne d’une Los Angeles baignée de soleil, ses voitures d’un autre âge et son détective bourru (et rembourré) accro aux clopes, Carnage chez les Puppets nous transporte vers une Amérique que les moins de 20 ans ne connaissent pas. Ambiance et mise en scène sont clairement héritées de la fin du siècle dernier, et si l’ensemble est très propre, il manque singulièrement de modernité et de fantaisie. Le scénario, un grand classique du polar américain, ne nous aidera pas à regagner notre époque, mais il n’en est pas moins suffisamment convaincant pour qu’on daigne le suivre sans déplaisir. D’autant qu’il nous transporte dans les lieux emblématiques du genre : Repaires de gangsters, squats de drogués et autres sex-shop poisseux. Autant d’endroits mal-famés prétextes à divers gags mettant en scène les puppets et leurs mœurs parfois étranges, ces créatures de tissus étant au moins aussi dingues que les toons de Qui veut la peau de Roger Rabbit, quoique terriblement plus borderlines.

Carnage chez les Puppets, s’il ne surprend pas par sa construction, nous amuse avec son humour trash bien présent (mais finalement moins que ne le laissait entendre sa bande-annonce), ses situations déconnantes et ses vannes cradingues qu’on ne s’attend certainement pas à entendre dans les bouches de feutre de gentilles marionnettes. Pourvu qu’on soit bon public du genre, la grande majorité des vannes fait mouche, et une légion de petites idées contribuent à offrir une épaisseur à cet univers délirant (puppets accros au sucre comme les humains peuvent l’être à la cocaïne, leur peur incommensurable d’être déchiquetés par les chiens, etc…). Et au milieu des poupées foldingues, Melissa McCarthy, fidèle à elle-même, cabotine avec le personnage brut et grossier auquel elle nous a habitués, lequel, il faut bien l’admettre, colle très bien à cet univers décalé.

Rejeton bâtard de Scary Movie et de Qui veut la peau de Roger Rabbit, Carnage chez les Puppets est loin d’être la catastrophe annoncée. Certes, on peut lui reprocher son style vieillot et son scénario cliché, néanmoins, les amateurs d’humour régressif ne devraient pas le bouder. Moins donneur de leçons (stupides) que ne l’a été Sausage Party, son but est simplement de nous mener d’un point A à un point B en émaillant notre voyage de franches parties de rigolade, et on n’en demande pas plus.

Un article de Guillaume Boulanger-Pourceaux

 

CINEMA, EN SALLE

Mortelle partie de pêche

En Eaux troubles.Résultat de recherche d'images pour "en eaux troubles"

Action, Thriller – USA

Réalisé par Jon Turtletaub

Avec Jason Statham, Bingbing Li,

Rainn Wilson, Winston Chao…

Sortie en salle le 22 Août 2018

Distribué par Warner Bros France

Au sein de la station de recherche sous-marine Mana One, c’est l’effervescence. On y organise une expédition hors du commun à la découverte d’un écosystème inconnu, caché au plus profond de l’océan Pacifique. Mais à peine découvert, il s’avère que cet environnement se révèle bien plus hostile que prévu. Alors que l’équipage parvient in extremis à se sauver de ces profondeurs menaçantes, quelque chose l’a suivi jusqu’à la surface, le plus redoutable prédateur marin que la Terre ait porté : Le mégalodon.

Dire qu’En Eaux troubles revient de loin serait un euphémisme. Ce projet date tout de même du siècle dernier. En 1997, l’auteur Steve Alten accouche de Meg : A Novel of Deep Terror. Comme Jurassic Park quelques années plus tôt, les droits sont très vite achetés, par Disney en l’occurrence, mais le projet est rangé dans un tiroir. La cause ? La sortie deux ans plus tard du Peur Bleue de Warner. Pour le bien, certainement, car ce dernier aura engendré un beau score au box-office, en dépit d’un scénario peu inspiré et de scènes d’un ridicule presque sharknadoesque. Dès lors, l’adaptation du roman, d’abord oubliée, passe de main en main avant de finir sur le bureau de Jon Turtletaub et finalement sur nos écrans, 20 ans plus tard, à une époque où le film de requins est après tout florissant.

Évidemment, loin d’être un genre en soi, le spectre des films mettant en scène toutes sortes de squales est on ne peut plus large, partant des angoissantes Dents de la Merde Spielberg, en passant par l’étouffant 47 meters down, pour rejoindre des projets plus originaux tels que L’Attaque du requin à 2 têtes, Sharktopuset d’autres variations du genre, et finir avec la déconnante pentalogie Sharknado. Bref, le genre est aussi large qu’une mâchoire de grand blanc, et étrangement situerEn Eaux troubles sur cet éventail peut se révéler compliqué. Ne serait-ce que son titre. En VF, il nous promet de la terreur et du suspense, alors qu’avec The Meg en VO, on comprend bien plus facilement qu’on a affaire à du lourd, de l’action bien grasse. De fait, en dépit des possibles intentions de ses producteurs, En Eaux troubles fait un bien piètre film d’horreur. Pas l’ombre d’un moment de surprise, ni même un tout petit jump-scare pour marquer le coup. À moins que vous ne soyez une baleine (on ne juge pas), lesquelles prennent quand même très cher en terme de déchiquetage, même les scènes les plus sanglantes n’ont pas le potentiel de nous faire frissonner. Mais une question se pose finalement : Peut-on vraiment faire de l’horreur (sérieuse et viscérale s’entend) avec un requin de 25 mètres ?

Après tout, toute l’horreur et la terreur qu’inspirent le requin viennent de sa nature de prédateur particulier, pour ne pas dire opportuniste. Son aileron n’est jamais plus terrifiant que quand il disparaît sous les eaux, et une fois immergé, sa discrétion est proverbiale. De plus, la bête a un sens pratique des plus cruels, mordant sa proie pour en emporter un morceau pour aller manger plus loin, avant d’éventuellement revenir se servir. Une glaçante manière de chasser, admettons-le, bien loin des capacités du mégalodon, dont la mâchoire se révélait tellement large qu’il pouvait avaler un humain avec autant de facilité que Monstro déglutit Pinocchio. Nul besoin de déchiqueter la carcasse du baigneur avant de se régaler. Quant à parvenir à se cacher, n’en parlons pas. S’il tente vaguement de nous surprendre en exploitant le hors-champ, on a bien du mal à croire qu’un poisson de 25 mètres de long puisse vous tourner autour à moins de 10 mètres sans qu’un de ses ailerons n’entre dans votre champ de vision. Autant dire que le potentiel horrifiant du mégalodon n’atteint pas celui du bon vieux requin blanc. L’horreur est un genre qui se joue de la taille.

En revanche, dans les eaux tumultueuses de l’action, En Eaux troubles se défend avec une fougue que ne renierait pas un espadon hameçonné au bout d’une ligne, avec ses séquences de sauvetages sur le fil et d’attaques de requins sous stéroïdes. Certes, l’ensemble ne nous réserve pour ainsi dire aucune surprise, et l’humour décomplexé habituellement dévolu aux productions de ce genre est plutôt pataud, et parfois même très mal amené, néanmoins, les effets spéciaux donnant vie à la bête se révèlent plutôt décents compte tenu du budget et pas mal de séquences marqueront un peu leur spectateur (L’attaque de la station sous-marine, Jason Statham jouant les appâts accroché à un câble tracté par un bateau lancé à pleine vitesse), tandis que d’autres, bien qu’impressionnantes c’est vrai, se révèlent globalement inutiles (et se concentrent principalement vers la fin). Clairement, l’ennui a fait ses valises et est allé se prélasser sous d’autres cieux.

Portant les marques de sa lente gestation, En Eaux troubles ne fera pas frissonner les amateurs d’horreur. Il n’émerveillera pas non plus les esthètes des personnages fins et bien écrits. En revanche, les amateurs de traque démesurée, biberonnés aux invraisemblables productions 90’s et leurs effets spéciaux (préhistoriques vus de 2018), trouveront un film haletant et sans temps morts. On aurait peut-être apprécié plus de profondeur, mais c’est déjà pas mal.

Un article de Guillaume Boulanger-Pourceaux

CINEMA, EN SALLE

Destination Pékin : Pas de quoi casser trois pattes à un canard

Destination Pékin.Résultat de recherche d'images pour "destination pekin"

Animation, Comédie – Chine, USA

Réalisé par Christopher Jenkins

Avec les voix Jim Gaffigan, Zendaya, Lim Lance

Sortie en salles le 15 Août 2018

Peng (Jim Gaffigan en VO / Éric Antoine en VF) est un jars gouailleur et farceur. À force d’arrogance et d’imprudence, il se casse l’aile à quelques heures du début de la migration. Laissé en arrière, il fait la rencontre de Chi (Zendaya) et Chao (Lim Lance), deux canetons que ses extravagances ont séparé de leur groupe. Tous les trois sont cloués au sol, alors qu’à cela ne tienne, ils entreprennent d’effectuer leur voyage à pieds.

Si vous nous suivez depuis plus d’un mois, il est possible que vous ayez parcouru notre article sur L’Envol de Ploé. Si c’est le cas, nous vous annoncions la sortie de Destination Pékin, qui se place au rang des films exploitant les migrations aviaires comme archétype du voyage initiatique (et si ce n’est pas le cas, sachez que nous vous en tenons pas rigueur, mais que nous sommes quand même très déçus). Une annonce certes un peu hâtive et gratuite car nous n’avions pas eu l’occasion de le voir. Un détail qui vient donc d’être corrigé. Alors que peuvent bien valoir les aventures de Peng et de ses canetons facétieux maintenant qu’elles s’avancent devant les poids-lourds Les Indestructibles 2et Hôtel Transylvanie 3 ?

Autant le dire tout de suite, pas grand-chose. En dépit de quelques idées, Destination Pékin se crashe en beauté. Et en beauté, c’est bien le mot car son habillage est on ne peut plus plaisant et convaincant. Les décors sont chatoyants et les personnages parsemés de détails, le travail des animateurs mérite bien quelques éloges. Mais c’est à peu près tout ce qu’on peut lui reconnaître. Le problème étant que l’emballage est loin de suffire à rattraper les immanquables faiblesses de ce film définitivement boiteux.

Dommage en effet que les scénaristes, dont certains ne sont pourtant pas novices en animation (pour avoir officié sur Shrek, la saga Clochette ou encore En route), n’aient pas été plus inspirés. Ce voyage à travers les paysages emblématiques de la Chine (ses rizières, ses montagnes, etc) laisse tout de même un arrière-goût de réchauffé, et ce, même s’il essaie de faire preuve d’un peu de fantaisie narrative à quelques minutes de la fin. Pourtant, quelques-unes de ses idées auraient pu en faire un film un peu plus audacieux, comme son méchant clairement sous-exploité, qui se débat entre ses deux personnalités, oscillant entre pragmatisme menaçant et psychopathie inquiétante, ou la profusion de jeux-de-mots d’autant plus navrants que les doubleurs ne semblent absolument pas assumer leur facilité (et on les comprend, hélas). Ne restent finalement que des gags éculés, ayant le plus souvent pour thématique les pets (Rigolo et ton sur ton quand on fait Shrek, beaucoup moins pour une histoire d’oie en migration), et beaucoup de blabla, un ensemble qui meuble quand même assez difficilement cette heure et demi. Dans la salle, les plus petits peuvent être parfois réceptifs (les éclats de rires n’en sont pas moins rares).

En le relâchant à moins d’un mois de la rentrée des classes, les producteurs de Destination Pékin avouent presque d’eux-mêmes que leur film n’a pas les armes pour résister aux autres, et ils ont sans doute raison. Pensé comme une carte postale d’une Chine sublime (ce qu’elle est certainement) avant d’être pensé comme un film (ce qu’il a beaucoup plus de mal à justifier), Destination Pékin  se révèle décevant, la faute à un scénario indigent et à un flagrant manque d’audace.

Un article de Guillaume Boulanger-Pourceaux

 

CINEMA, EN SALLE

Une course contre la mort

Mission Impossible Fallout (2018)Résultat de recherche d'images pour "mission impossible fallout"

Action – espionnage

Un film de Christopher McQuarrie

Avec Tom Cruise, Henry Cavill,

Simon Pegg, Rebecca Ferguson, etc

Sortie le 1eAoût 2018

Distribué par Paramount

Dire que le nouveau volet de la saga Mission Impossible était attendu n’est pas un euphémisme. Après le succès public et critique de Rogue Nation, le retour de l’agent Ethan Hunt était d’autant plus attendu que son tournage parisien avait fait grand bruit. Il marque aussi une nouveauté dans cette marque maintenant devenue incontournable : c’est la première fois qu’un réalisateur reprend son poste pour prolonger sa vision. Christopher McQuarrie nous offre un épisode crépusculaire où ses personnages vont être confrontés à un danger bien plus grand que jamais.

Après l’échec d’une de ses missions qui l’a vu perdre trois charges de plutonium, l’agent Ethan Hunt (Tom Cruise) et son équipe ne sont plus en odeur de sainteté auprès du gouvernement américain. La CIA leur adjoint un agent (Henry Cavill) pour veiller à la récupération des précieuses bombes et empêcher leur utilisation. Mais l’ombre d’un mystérieux Mr Lark plane sur toute cette affaire.

Soyons honnêtes, les révélations de ce film sont cousues de fil blanc. L’ensemble ne parvient pas à créer de suspense : les motivations et les identités des personnages sont assez évidentes. Mais cela ne gâche pas pour autant le plaisir car le réalisateur et le scénariste en prennent leur parti pour déplacer la tension ailleurs. Ainsi, chaque séquence d’action est un petit bijou de manipulation visuelle et de surprise.

Christopher McQuarrie joue sur les attentes des spectateurs et détourne l’attention tel un magicien par des associations d’idées visuelles. Il joue sur les couleurs, les perceptions et va contre elles pour cueillir le spectateur. Les scènes d’actions ne sont pas toujours crédibles, mais elles sont vives et enthousiasmantes. Dans un monde où Marvel est parvenu à aseptiser les morceaux de bravoure de ses films, Mission Impossiblese désigne comme un bon remède. On y retrouve la folie et la fougue des productions Bruckheimer des années 90 : peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse.

Le réalisateur filme Paris au plus proche de la réalité. Le débat autour de la crédibilité des déplacements d’Ethan Hunt dans la capitale n’a pas lieu d’être. Le cinéma n’est pas le lieu de la véracité mais celui des images. Après tout, c’est un problème parisiano-parisien de se dire qu’il est impossible que Montparnasse soit dans la continuité de la rue de Rivoli. De plus, Christopher McQuarrie nous fait grâce des clichés habituels et sublime des endroits inattendus comme le ministère des finances.

Mais ce qui domine ce nouveau long métrage de plus de deux heures, c’est son rapport avec la mort. Jamais Ethan Hunt n’est apparu aussi fragile, aussi proche de rater sa mission. On a beau savoir qu’il gagnera probablement à la fin, le désespoir est palpable comme si plus rien n’était sûr dans notre monde actuel. Le pré-générique se démarque ainsi de ses prédécesseurs par une absence de morceau de bravoure et un échec cuisant.

Mission Impossible Fallout est le blockbuster de l’été attendu. Ses scènes d’actions toutes plus improbables les unes que les autres sont réjouissantes et l’alchimie entre les comédiens fonctionne à plein régime. Il ne fait aucun doute qu’il terrassera sans soucis ses adversaires car l’ensemble sent la sincérité de la démarche et une certaine idée du film d’action qui résiste face à l’uniformisation.

 

CINEMA, EN SALLE

Un dragon loin d’être docile

Détective Dee – La Légende des Rois CélestesRésultat de recherche d'images pour "detective dee la légende des rois célestes"

Action, aventure – Chine

Réalisé par Tsui Hark

Avec Mark Chao, Feng Shaofeng, Carina Lau…

Sortie en salles le 8 Août 2018

Peu de temps après avoir élucidé le mystère du Dragon des Mers, l’imparable Détective Dee (Mark Chao) reçoit, des mains de l’Empereur en personne, Dragon Docile, l’arme symbole qui le place à la tête du Temple Suprême. Mais dans l’ombre, une vague de crimes vient agiter la capitale, et alors que Dragon Docile attise les convoitises, sorciers et conspirateurs semblent s’être alliés pour renverser la dynastie des Tang.

Quand il sort en 2011, Détective Dee – Le Mystère de la Flamme Fantôme arrive sur le tard d’une mode popularisée voilà plus de 10 ans auparavant par un certain Tigre et Dragon, immense succès mondial qui remit au goût du jour le « Film de sabre » chinois. Pourtant, son réalisateur Tsui Hark est loin d’être un novice en la matière, puisqu’il a signé la trilogie Il était une fois en Chineavec Jet Li sortie peu de temps auparavant. Ces deux sagas du réalisateur de Zu, Les Guerriers de la Montagne Magique ou de Seven Swords partagent par ailleurs un point commun de taille : elles ont toutes deux pour base un personnage historique devenu légendaire dans l’imaginaire chinois, le médecin et maître de kung-fu Wong Fei-Hung et le juge Di Renjie dont les capacités de déduction l’ont fait entrer dans les annales judiciaires. Ce même juge qui fut à l’origine d’un personnage littéraire, le juge Ti, héros de romans repris par plusieurs auteurs.

Narrant l’enquête qui doit sacrer la réhabilitation du juge Dee, après son emprisonnement pour avoir contesté l’accession de l’Impératrice Wu Zetian (le contexte historique, des livres autant que des films, est par ailleurs exact), ce premier épisode mêlait déjà habilement intrigues de palais et surnaturel, combats virevoltants et grand spectacle. Avec sa suite, Détective Dee – La Légende du Dragon des Mers (2014), la franchise revient aux origines du personnage et à la première enquête qu’il mena pour le Temple Suprême, à savoir l’étrange attaque menée contre la flotte impériale par un monstre marin. Cette fois, la recette s’affine sans changer fondamentalement. Le budget, un peu plus confortable, autorise les effets spéciaux à être encore plus présents et aux capacités de déduction de Dee d’être un peu mieux appréhendées. Mais là encore, l’intrigue n’en est pas moins fouillée et les scènes d’action toujours plus impressionnantes et inventives.

Autant dire que les fans de la saga attendaient la suite des aventures du juge-détective de pied ferme, et tout amateur de cinéma d’aventure et d’action aurait dû partager cette attitude tant Détective Dee représente le genre dans ce qu’il a de plus subtil et malin. Un suspense soutenu hérité du polar, de l’action fulgurante tout en étant lisible, et des effets spéciaux impressionnants (toutes proportions gardées, nous ne sommes pas devant une production du calibre d’Avatar non plus) qui restent au service de l’intrigue. Dans ce troisième épisode, Tsui Hark prend le parti de prolonger le modèle de son deuxième opus, jusque dans le scénario, celui de cette suite débutant là où La Légende du Dragon des Mers s’était achevé. Que ceux qui craindraient de se retrouver perdus se rassurent, les liens unissant les deux épisodes ne vont pas plus loin et les relations, parfois ambiguës, entre les personnages canoniques, ainsi que les dilemmes qui les agitent, parviennent à rester compréhensibles en dépit de leur complexité.

Malgré tout, le maître d’œuvre ne joue pas les paresseux, ajustant le cap à cette nouvelle intrigue. Outre un humour un peu plus présent que dans les épisodes précédents, et qui apporte des moments de détente bienvenus, ce sont les effets spéciaux dont on remarque la présence plus prégnante. Pour autant, ils ne sont pas de trop pour personnifier les manipulations mentales dont sont capables les membres d’un clan de sorciers. Ils sont d’autant plus respectables qu’ils nous offrent un spectacle de toute beauté, s’autorisant à donner vie à un incroyable bestiaire folklorique, et même une réjouissante référence finale à un certain King Kong. Pourtant, ce grand spectacle permanent ne nuit ni à ses scènes de combats, toujours aussi légères et parfaitement chorégraphiées, ni à son intrigue, pleine de rebondissements et de zones d’ombres. Surprenant, le film l’est tellement qu’il ne se permet pas moins de trois scènes qui prolongent l’intrigue au cours du générique (et introduisent peut-être un quatrième épisode faisant le lien avec Le Mystère de la Flamme Fantôme ?), prenant au dépourvu les plus pressés de ses spectateurs.

Au milieu des blockbusters estivaux, pour certains bien ficelés, très recommandables et surtout très bien pourvu d’un strict point de vue marketing (Coucou Jurassic Worldet Ant-Man et la Guêpe), il est vrai que Détective Dee peut faire figure d’outsider. Pourtant, il nous apporte quelque chose dont tous les autres sont et seront (sans doute) toujours dépourvus : l’inattendu !

Exotique, malin et superbement mis en scène par un maître du genre, Détective Dee – La Légende des Rois Célestesest sans conteste un rendez-vous incontournable du cinéma d’aventure et d’action, et à ce titre, il devrait être inscrit dans les agendas de tous les amateurs de ces genres. Quant aux autres, ils ne devraient pas hésiter à leur emboîter le pas.

Un article de Guillaume Boulanger-Pourceaux

CINEMA, EN SALLE

I’ve been cheated by you, and i think you know when…

Mamma Mia – Here we go again ! (2018)Résultat de recherche d'images pour "mamma mia 2"

Comedie Musicale

Un film de Ol Parker

Avec Amanda Seyfried, Lily James, etc

Sortie le 25 Juillet 2018

Distribué par Universal France 

Il y a tout juste dix ans, un film naïf et frais débarquait sur nos écrans de cinéma. Cette adaptation d’un succès de la scène anglo-saxonne relevait de l’improbable. Qui aurait pu imaginer Pierce Brosnan, Colin Firth ou Meryl Streep chanter et danser sur les meilleurs tubes du groupe ABBA ? Et pourtant, la recette fonctionnait. Peut-être grâce au plaisir communicatif du casting ou à la fibre nostalgique qu’instaure immédiatement un titre du groupe suédois. Toujours est-il que le film est devenu culte et qu’il remplit encore les salles dix ans après pour des séances karaoké.

On croyait avoir échappé à une suite inutile. On pensait qu’Universal garderait sa pépite telle qu’elle était, mais non ! Il a fallu qu’ils mettent un deuxième film en chantier. Un deuxième film auquel personne ne croyait, Amanda Seyfried en tête comme elle l’a déclaré dans une interview. Les fans tremblaient et ils avaient raison.

Rien n’était fait pour nous rassurer : le retour de Meryl Streep trop longtemps incertain, les chansons qui seraient utilisées puisqu’ils avaient usé tous les grands tubes, l’histoire qui nous serait contée, etc… Dès lors, on ne peut pas dire que ce film soit une déception tant le désastre était annoncé. Au moins, il est cohérent avec ce qu’on en attendait : rien. Enfin, nous espérions tout de même d’avoir tort. Ô doux espoir !

L’histoire est tellement simple qu’en vous racontant le début du film, on vous en raconte aussi la fin. Sophie (Amanda Seyfried) organise la réouverture de l’hôtel de Donna (Meryl Streep) après son décès. En parallèle, nous suivons la jeunesse de Donna (Lily James) qui va rencontrer trois hommes à la suite. On en connaît la fin. Et c’est d’ailleurs le premier défaut scénaristique du film : il n’y a jamais d’enjeu. À ne jamais vouloir choisir entre le préquel ou le sequel, Ol Parker n’en traite aucun des deux.

Dans son intrigue du passé, il accumule les révélations qu’on connaît déjà. On nous raconte une histoire qu’on avait très bien saisie dans le premier. Rien de plus ! Rien de plus, mais tout de même des choses en moins. Ainsi, il charcute le travail de Catherine Johnson, scénariste du premier film et auteur de la comédie musicale. Il réduit les personnages à des caricatures. Donna, dont la jeunesse était dépeinte comme celle d’une femme forte, indépendante et à la sexualité libérée devient esclave de son cœur et prude. Elle semble s’excuser de coucher avec Bill, Sam ou Harry. C’est un contre-sens. Et il fait la même chose sur les autres personnages.

La distribution d’origine s’en rend d’ailleurs compte et tourne en mode automatique. Seule Julie Walters trouve une occasion de faire le clown. Mais ramer sur un paquebot ne sert à rien. Pour ce qui sont des autres, ils sont fantomatiques. Ils déroulent leurs textes et leurs chansons sans énergie. Ce sentiment culmine dans une reprise de Dancing Queen qui référence la même séquence dans le premier opus. Un plan sur le regard de Christine Baransky dévoile qu’elle se demande ce qu’elle fait là. Puis, elle repense aux zéros sur le chèque, et ça va mieux. Le sentiment du spectateur est le même, tout ceci a un goût de réchauffé dans un micro-onde qui marche mal.

Prenons aussi quelques instants pour vous parler de l’usage abusif de la publicité mensongère autour du film. En effet, cela ne vaut pas le coup de parler des jeunes comédiens qui assurent la partie préquel tant ils sont anecdotiques, transparents et choisis uniquement pour leurs beaux minois. Le public attend la grosse annonce, l’élément incontournable de cette suite : la participation de la déesse Cher. Tâchez d’en profiter, elle n’est là que dix minutes. C’en est d’ailleurs dommage tant elle éclaire l’écran et offre une interprétation inoubliable de Fernando avec un Andy Garcia transi. Ne parlons pas de Meryl Streep, au centre sur l’affiche qui ne dépasse pas les 5 minutes de présence à l’écran (sauf si on compte toutes les photos d’elle). À ce compte-là, Marvel devrait penser à mettre Stan Lee sur ses affiches.

Reste le plaisir intact d’entendre les titres d’ABBA qui apporte un vent frais bienvenu en cet été caniculaire. Ils sont particulièrement bien arrangés par Benny Anderson et Bjon Ulvaeus mais servis par une mise en scène à la ramasse. Ce qui n’est pas étonnant quand on sait que le réalisateur lui-même avoue ne pas s’y connaître en comédie-musicale et avoir demandé des conseils à sa fille de 22 ans. Il nous semble que ça résume bien le sérieux de l’entreprise.

Mamma Mia – Here we go again ! est une déception de chaque instant et n’est sauvé de la poubelle que par sa bande originale enthousiasmante qui vous fera bouger sur votre siège. Dommage qu’il soit réalisé comme un mauvais épisode de Glee et, visiblement, sans amour pour le film d’origine. On prend plaisir à retrouver les personnages qu’on a aimé mais on les voit fatigués et lassés. Comment pourrait-il en être autrement devant autant de vide ?

CINEMA, EN SALLE

Dracula et ses potes sont sur un bateau…

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Animation, comédie – USA

Réalisé par Genndy Tartakovsky

Avec les voix de Adam Sandler, Andy Samberg,

Selena Gomez…

Sortie en salles le 25 Juillet 2018

Dans son hôtel réservé à sa monstrueuse clientèle, Dracula (Adam Sandler) se morfond. Veuf de puis plus d’un siècle, la solitude lui pèse. Pour lui changer les idées, sa fille Mavis (Selena Gomez) lui organise des vacances. Les voilà partis en croisière avec tous leurs amis sur le Legacy, l’immense paquebot sous les ordres de la mystérieuse commandante Éricka (Kathryn Hahn).

Après un premier épisode dépeignant un Dracula gérant d’hôtel catastrophé à l’idée de voir sa fille s’enticher d’un humain et quitter son giron, et un second où il tente par tous les moyens d’élever son petit-fils en bon vampire, Dracula et ses amis Franky la créature de Frankenstein, Murray la momie, Wayne le loup-garou et Griffin l’homme invisible sont de retour. Et cette fois, ils laissent derrière eux la Transylvanie et son hôtel éponyme pour un radical changement de décor. Pour le meilleur ?

Dès sa séquence d’ouverture, Hôtel Transylvanie 3 annonce la couleur. Personnages d’une absolue souplesse, mimiques tordantes et gags visuels abondent. La patte artistique si particulière de Genndy Tartakovsky est toujours là, et son talent pour mettre en scène et enchaîner les gags les plus cartoonesques à la vitesse de l’éclair toujours intact. On aurait pu s’attendre à ce que les idées se raréfient, d’autant qu’un paquebot de croisière n’est jamais qu’un hôtel posé sur l’eau, mais il n’en est rien. Au contraire. À la clique à Drac viennent s’ajouter profusion d’autres personnages et de situations plus cocasses les unes que les autres, comme Blobby le blob de gelée verte, spécialiste de l’humour visuel (il n’a en effet aucune ligne de dialogue proprement dite) qui, après avoir trusté une place au sein de la petite bande dans le deuxième opus, multiplie ici les apparitions, tantôt mignon tantôt dansant, et toujours hilarant. Les gags remportent sans mal l’adhésion des petits comme des grands, et la bonne humeur remplit la salle plus facilement que l’estomac de Franky.

Pour ce qui est de son développement, le film effectue un petit retour en arrière. Outre les références immanquables aux précédents films (le « bla-bla-bla » que tous imputent à Dracula, et qu’il s’obstine à nier, la pyrophobie explosive de Franky, ou les sorcières du premier épisode formant une sorte de haie d’honneur à la présentation du navire), c’est le veuvage de Drac et le fameux « zing » qui servent de trame de fond à cet épisode, et la relation ambiguë qui se met en place entre lui et la commandante Éricka, mais dont on ne dira pas plus, afin de ne pas gâcher une intrigue certes cousue de fil blanc, mais diablement efficace. Le film se permet le luxe d’une séquence un peu plus calme, un coup de frein peut-être un peu brusque, mais pour mieux nous proposer quelques moments émouvants au milieu de toute cette tornade tordante, avant d’embrayer sur un final musical absolument détonnant.

Si nombre de franchises finissent par s’essouffler avec le temps, Hôtel Transylvanie nous revient dans une forme insolente. Toujours aussi dingue et drôle de bout en bout, ce troisième épisode confirme que Dracula et ses potes ont encore de bons jours devant eux. Un grand éclat de rire à partager en famille ou entre amis.

Un article de Guillaume Boulanger-Pourceaux